Parce que le problème, c’est que dans ma tête, dans mon cœur, je me sens encore toute élastique .

Je regarde parfois mes mômes en me disant que non décidément, ce n’est pas possible, ces enfants là si grands ne sont pas déjà les miens, et quand je regarde mon mec, celui là même qui mettait des coups de pied aux barrières érigées, il ya dix ans, quand je regarde mon homme planqué derrière son canapé, les oreilles braquées sur les enceintes de la télé,

 enfoui dans son petit cocon innervé, manquant de cruelle sensualité, quand je le regarde, camouflé derrière ses yeux bovins, sans vie, sans amour, sans joie, sans conscience, sans personnage propre, quand je le regarde mourir, dans sa peau déjà toute vide de passions, je nous déteste.

Je ne veux pas vieillir avec un autre que moi. Parce que c'est douloureux de comprendre que l'amour est parti.

Mais celui que je déteste le plus ce soir, c’est la suspension inégale et étroite qui obscurcit mon cœur depuis tous ces mois .

Celui qui m’a noyée dans un flot de sentiments faux et provocants. Celui qui m’a fait croire que le battant de mon clocher privé n’était pas mort, celui qui me croit belle et celui qui ouvre les portes de mon destin. Celui que ma muse a élu comme poète.

On tourne les pages d’un livre qu’on désire, et on - le temps d’un plus ou moins bref moment-, désire vivre cette histoire en entier, en être un de ces personnages principaux. On ne tapote pas le bouquin, en faisant autre chose on s’investit et on ressent.

 Je te déteste.